Inside La Place – Quand Inside La Place rencontre Inside Bordeaux

Quand Inside La Place rencontre Inside Bordeaux

Jane Anson

Auteur Inside Bordeaux & Critique de vin Britannique

Rencontré par Gerda


 

Je connais Jane depuis de nombreuses années. Nous nous sommes rencontrées autour d’un café, et non un verre de vin, le lundi matin après la semaine des Primeurs. Jane a créé son propre site internet Inside Bordeaux le 16 Octobre 2021. Deux jours plus tard, je déjeunais avec Roland Coiffe pour parler du lancement de notre communication Inside La Place ! Quelle coïncidence ! Deux étrangères qui font partie de ce dynamique et fascinant Inside Bordeaux. Cela reflète bien la mentalité de la région qui a toujours été ouverte aux étrangers. Notamment grâce à sa position géographique sur la côte. Le port était autrefois le lieu où les gens du monde entier pouvaient se rencontrer. Aujourd’hui, le lieu de rencontre a changé mais la mentalité de Bordeaux reste la même.

Gerda : Parlez-nous de vous…

Jane Anson : Je suis née à Oxford et j’ai vécu à Hong Kong, au Japon et en Australie. J’ai toujours travaillé en tant que journaliste, comme cela a été le cas à Hong Kong de 1994 à 1997. Je suis par la suite revenue sur Londres en 2003. J’ai décidé d’entreprendre ensuite un voyage à Bordeaux car j’étais intéressée par le monde du vin et écrire sur l’histoire des Châteaux. J’ai finalement finie par déménager sur Bordeaux, qui est le centre du monde du vin. J’ai écrit mon premier livre sur Bordeaux en 2012 : Bordeaux Legends, the First Growths. 

C’est difficile de parler de soi-même. Je me décris comme une travailleuse qui se pose constamment des questions. Je suis toujours dans l’apprentissage et je prends mon travail très au sérieux, pas ma personne. C’est mon côté anglais (en riant).

Je suis intéressée par l’histoire et j’aime mettre en lumière des anecdotes sur les vins. Par exemple, avant Noël, j’ai dégusté 21 millésimes de Château Palmer pour mon site internet. Je n’ai pas seulement écrit sur la dégustation mais aussi sur l’homme qui a donné son nom au Château, Charles Palmer. Il a eu une vie intéressante. Dans ce cas, les gens ont l’histoire du vin dans un contexte plus profond. Je suis une critique de vin mais la notation ne représente qu’une infime partie du monde du vin.

Gerda : Pourquoi devenir critique de vin ?

Jane Anson : Je suis une écrivaine et j’essaie toujours de comprendre ce qui m’entoure. Je veux comprendre pourquoi les vins ont ce goût et ensuite le communiquer à tous les amateurs de vins. 

G : Pourquoi avez-vous une passion pour Bordeaux ?

Jane Anson : Bordeaux est une ville connectée au monde. Sa location fait de cette ville un endroit majeur pour les voyages et le commerce à travers l’histoire. Beaucoup de tendances ont débuté à Bordeaux, de l’élevage en barrique de style moderne à la valorisation de la marque en passant par la compréhension des mécanismes de la fermentation malolactique. La ville a toujours été en première ligne, c’est un endroit où il y a une bonne atmosphère !

: Pourquoi avez-vous lancé votre site internet ?

Jane Anson : Il y avait un trou dans le marché. Il existe 4 à 5 sites internet sur les vins de Bourgogne mais aucun sur les vins de Bordeaux, qui est une région importante pour les vins. Aucun site ne se penchait sur l’évolution de Bordeaux en termes de vins icones du monde qui sont maintenant vendus sur la Place de Bordeaux et dont je parle également dans mes dégustations. J’ai pris la décision d’être complétement indépendante quant au financement de mon site internet. Beaucoup d’argent circule sur Bordeaux avec des investisseurs étrangers mais je voulais que mon site internet soit un endroit où les gens viennent lire une critique indépendante. Après deux mois de lancement, j’avais des abonnés provenant de 34 pays différents et des lecteurs de 110 pays. Cela montre à quel point Bordeaux est international.

Mes mentors à Bordeaux sont : Denis Dubourdieu qui a été très important pour moi et m’a encouragé dans mes études pour le DUAD (Diplôme Universitaire Aptitude à la Dégustation), mais aussi Jean-Claude Berrouet et Jean-Michel Cazes (dont je traduis la biographie). Lorsque je suis arrivée à Bordeaux, Jean-Michel m’a offert deux livres de René Pijassou afin de connaître davantage l’histoire du Médoc.

: Vous travaillez et vivez à Bordeaux, est-ce-que c’est difficile de garder son indépendance dans ces conditions ?

Jane Anson : Je vis avec mon mari qui est aussi anglais, dans le centre de Bordeaux. S’installer dans le centre et non dans la campagne me permet de rester indépendante. Chaque année, je vis les conditions climatiques du millésime. Bordeaux compte des milliers de vins et il est difficile de rester connecté et à l’affût du moindre changement lorsque l’on vient uniquement quelques fois par an.


Le travail

 

Gerda : Comment faut-il définir le métier d’un critique et d’un formateur du vin ?

 

Jane Anson : Je donne un contexte aux vins. Ce n’est pas par rapport à moi ! Je suis une voix indépendante qui peut aider les gens à se diriger vers un vin puis par la suite le déguster eux-mêmes.

Je parle de différents facteurs qui impactent le vin comme par exemple, l’histoire du domaine, le terroir. Je mets en lumière les tendances. C’est un peu comme leur donner la clé qui va leur permettre de déverrouiller leur goût.

 

G : Peut-on parler d’un goût Anglais pour le vin ?

JA : Il n’y a pas de goût commun à chaque pays. Dès qu’on connaît les personnes qui boivent le vin, on se rend compte que l’on ne peut pas faire de généralisation.

G : Comment vous décrivez votre goût personnel ?

JA : Je tiens à ce que chaque vin reflète l’endroit où les vignes sont cultivées. Chaque appellation a sa propre typicité et cela doit se refléter dans le vin. Au cours des cinq dernières années, à Bordeaux, nous sommes passés de vins axés sur la technique, à des vins davantage axés sur le vignoble, ce qui est une excellente chose. De même pour l’accent mis sur les préoccupations environnementales, nous devons féliciter le Château Pontet-Canet et le Château Guiraud pour avoir ouvert la voie dans ce domaine.

 


Le produit

 

Gerda : Pourriez-vous me décrire un vin exceptionnel ? 

Jane Anson : Il y a des vins qui sont exceptionnels en fonction de l’endroit et des personnes avec qui vous les dégustez. Un vin exceptionnel a de la complexité et du mouvement, il vous fait sourire. Un vin profond vous fait réfléchir, comme par exemple un vin avec de l’histoire, c’est le cas de Château Mouton Rothschild 1945. Beaucoup d’humanité est capturée dans la bouteille. Vous pouvez voyager à travers le temps avec la bouteille. C’est magique !

: Est-ce qu’on peut donner objectivement des notes aux vins ?

JA : Question compliquée! Comme vous le savez, le vin évolue à travers le temps, il est donc compliqué de donner une note objective. Pourtant, certains vins méritent d’être notés comme exceptionnels. J’ai dégusté cinq fois Lafite Rothschild 1959 par exemple, il a toujours été incroyable. Quand on lit Frank Prial (journaliste et auteur, chroniqueur de vin pour le New York Times pendant 25 ans) au début des années 1980, il pensait déjà que le vin était exceptionnel à ses débuts et cela reste vrai.

Nous pouvons accorder trop d’importance aux notes. En tant que consommateur, il est plus important de lire le commentaire de dégustation et trouver le critique de vin qui reflète vos goûts. Il faut connaître le critique qui se cache derrière la note.

Mon livre « Inside Bordeaux » met l’accent sur la compréhension du terroir, des millésimes. Donnez aux gens des clés pour savoir quels vins ils aiment au-delà des notes.

: Comment pouvez-vous vous distinguer des autres critiques/formateurs du vin ?

JA : Je pense que j’ai une profondeur de connaissance importante sur les vins et la région de Bordeaux. J’ai écrit 7 livres sur la région bordelaise et je suis en train de traduire les mémoires de Jean-Michel Cazes en ce moment. Mon approche est très différente car je mets en avant le terroir. J’essaie, avec mon site internet, d’avoir une réelle connexion avec mes abonnés. Par exemple, j’ai créé une semaine « des mentors » qui se tiendra chaque année en septembre. Les jeunes qui débutent dans le vin sont invités à séjourner gratuitement une semaine à Bordeaux. Les candidatures pour la première année viennent d’être clôturées et c’était incroyable. Nous avons reçu des candidatures du monde entier, comme par exemple celle d’un ancien policier de Miami, de jeunes sommeliers de Porto Rico, d’Afrique du Sud, de Nouvelle-Zélande, d’Argentine, et même de personnes de Bordeaux. Nous avons eu plus de 10 candidats pour chaque place ! Avec ce projet, nous essayons de donner une chance aux personnes qui débutent dans le commerce du vin et d’accroître la diversité. Mes partenaires pour cette première édition sont Chinedu Rita Rosa, un consultant en exportation et en marketing du Nigeria, Château La Lagune, Vignobles Bernard Magrez, Quo Global et Club DVin. En plus de rencontrer des membres clés du secteur vitivinicole, de participer aux vendanges et de développer leurs compétences en matière de dégustation, les participants passeront un excellent moment. Nous espérons les motiver et leur donner des compétences pour leur propre carrière.  

: Pourriez-vous me mentionner une dégustation inoubliable ?

JA : Je suis très chanceuse d’avoir pu déguster, mis à part Château Mouton Rothschild 1945, une bouteille de Pétrus 2000 qui a passé 14 mois dans la Station Spatiale Internationale. J’étais la seule journaliste présente lors de cet évènement avec à mes côtés : des scientifiques de l’ISVV (Institut des Sciences de la Vigne et du Vin), Pierre Hurmic (le maire de Bordeaux), et Nicolas Gaume, le fondateur du projet. Nous avons dégusté trois bouteilles à l’aveugle pour voir s’il y avait une différence avec la bouteille qui est allée dans l’espace. Le projet est très intéressant et les résultats sont restés secret jusqu’à trois semaines après. Les résultats qui ont eu lieu trois semaines après, ont été repris dans tous les journaux à travers le monde. Le vin peut vous surprendre. C’était un moment inoubliable.


Le Futur de Bordeaux

 

Gerda : Est-ce que vous travaillez sur un projet précis en ce moment ?

Jane Anson : Mis à part la semaine des Mentors que nous avons créé pour les amateurs de vins haut de gamme avec Sarah Kemp, qui a été éditrice du magazine Decanter pendant 30 ans. Nous avons toutes les deux une connaissance approfondie de Bordeaux. Nous organisons la première semaine le mois prochain, en juin 2022, et nous ne l’organiserons qu’une fois par an. Notre objectif est que cette semaine devienne l’une des plus médiatisée du monde du vin Bordelais. On donne accès aux amateurs de vin à des grands Châteaux grâce à des dîners privés, des dégustations et de nombreuses autres surprises. S’inscrire sur mon site web, c’est comme rejoindre un club de membres. C’est un lien réel avec Bordeaux et ce n’est certainement pas élitiste. Mon objectif est de faire en sorte que si vous achetez, vendez, collectionnez ou souhaitez simplement en savoir plus sur les vins de Bordeaux et les vins emblématiques du monde, de Masseto à Opus One et bien d’autres encore, mon site en fasse un endroit amusant et enrichissant.

: Quels sont les nouveaux outils de communication dans votre métier ?

JA : Je suis chanceuse car Sarah, fondatrice des sites podcast The Wine Conversion, m’a aidé à créer mon propre podcast sur mon site internet. Je travaille aussi avec 67 Pall Mall qui est un groupe privé de vin. Ils sont basés dans quatres villes : Londres, Singapoure, Beaune et Verbier. Ils ont leur propre chaîne de télé sur le vin ce qui signifie que leurs abonnés ont trés régulièrement accès à des courts métrages et à des documentaires sur Bordeaux. Récemment, par exemple, il y a eu un reportage sur la bouteille de Petrus dans l’espace et un autre sur Liber Pater et les vignes non greffées. Je suis pleinement consciente que les gens veulent recevoir des informations de différentes manières, et j’essaie de leur procurer des mélanges de contenus et de formats.

G : Pouvez-vous décrire en quelques mots le millésime 2021 ? 

JA : Compliqué et surprenant.. Il y a plus de grands vins que ce que je pensais.

 

Gerda : J’aimerai finir avec les mots de Jane : « Plus je travaille dur, plus j’ai de la chance« .

 

 


Site Internet & Instagram

Gerda BEZIADE a une incroyable passion pour le vin, et possède une parfaite connaissance de Bordeaux acquise au sein de prestigieux négoces depuis 25 ans. Gerda rejoint Roland Coiffe & Associés afin de vous apporter avec « Inside La PLACE » davantage d’informations sur les propriétés que nous commercialisons.