Sandrine Garbay
Directrice Générale
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Château Guiraud
Premier Cru Classé Barsac Sauternes
Gerda : Tu es responsable des propriétés de Matthieu Gufflet — Château Callac, Château des Bachelards et Domaine Les Aurelles — mais en tant que directrice générale de Château Guiraud, quels sont les principaux défis auxquels tu fais face ?
Sandrine Garbay : Je m’occupe de la production, qui est le cœur de mon métier et de ma formation, mais aussi de la gestion des domaines, un aspect plus nouveau pour moi. Même si, après trois ans, j’ai beaucoup appris, cela me demande plus de temps, car je maîtrise moins cet aspect. Sur la partie production, l’enjeu est de sécuriser les récoltes, indispensables à l’équilibre économique. Le vignoble de Guiraud est très exposé au gel, et paradoxalement ce risque est accentué par le réchauffement climatique. Les vignes débourrent plus tôt et sont donc plus vulnérables en avril. Nous avons installé des tours anti-gel sur les meilleurs terroirs et pratiquons une taille plus tardive.
Nous sommes aussi très engagés en bio depuis 2011, Guiraud a été le premier Premier Cru Classé certifié. Face à la forte pression du mildiou, nous avons investi dans du matériel nous permettant de traiter toute la propriété en une journée, avec des équipes à la fois compétentes et réactives. Grâce à cela, nous avons sauvé le millésime 2024, malgré une pression inédite, et réalisé notre plus grosse récolte depuis mon arrivée. Cela montre que le travail porte ses fruits. Côté chai, nous avons affiné les choix d’élevage, notamment en matière de barriques, et la future rénovation du bâtiment nous aidera à préserver encore mieux la fraîcheur des vins. Nous avons aussi introduit la fermentation naturelle pour les liquoreux, avec des levures indigènes, ce qui améliore la pureté et la stabilité du vin. Je gère quatre propriétés, avec 35 personnes à Guiraud et 15 personnes réparties sur les autres domaines. Le défi commercial est majeur, notamment pour Sauternes. Même si je connaissais le négoce bordelais via la promotion, la relation commerciale en elle-même a été un vrai apprentissage. Les courtiers nous ont bien accompagnés et l’arrivée de Coralie Bernard pour renforcer l’équipe commerciale a beaucoup aidé. Dans le contexte actuel, la vente reste un enjeu essentiel pour toutes nos propriétés.
La marque Guiraud Aujourd’hui & Demain
G : Quel positionnement souhaites-tu pour vos marques ?
SG : Nous produisons quatre vins à la propriété. Le « G de Château Guiraud » est devenu une marque forte, très présente dans la restauration bordelaise. C’est un vin d’introduction, distribué via la Place de Bordeaux à hauteur d’environ 200 000 bouteilles par an, ce qui contribue à sa notoriété. En 2020, mon prédécesseur a lancé le Grand Vin Blanc Sec de Château Guiraud — une excellente idée, je dois le reconnaître. À cause du gel, nous ne l’avons pas produit en 2021, mais dès mon arrivée en 2022, nous avons élaboré le deuxième millésime. Ce vin, majoritairement composé de sémillon, incarne pleinement l’identité de Sauternes. Je l’apprécie beaucoup. Le sémillon est le cépage roi ici, et il doit le rester. Beaucoup de vignerons à Sauternes et Barsac travaillent aujourd’hui sur des blancs secs à base de sémillon, et je trouve cela très pertinent.
G : Faut-il créer une appellation Sauternes Blanc Sec ?
SG : Oui, j’y suis plutôt favorable. Historiquement, les blancs secs faisaient partie de l’appellation. Les liquoreux sont devenus dominants à la fin du XVIIIe siècle, et surtout au XIXe, mais les secs existaient bien avant. Il n’y a aucune honte à revenir à cette tradition. La demande en vins blancs secs augmente, et cela permettrait de montrer une autre facette de notre terroir, toujours avec une majorité de sémillon. Nous avons l’identité et la qualité pour revendiquer cette appellation, qui offrirait plus de visibilité à Sauternes. D’un point de vue économique aussi, ce serait utile : aujourd’hui, ces vins cotisent à l’appellation Bordeaux, alors qu’ils pourraient contribuer à l’AOC Sauternes. C’est un vrai atout pour valoriser nos blancs secs, mais aussi pour faire rayonner nos liquoreux. Je suis convaincue que les deux doivent aller de pair, même si les liquoreux restent notre cœur et notre priorité.
G : L’Institut Nationale de l’Origine et de la Qualité (L’INAO) a déjà reconnu l’appellation Médoc Blanc Sec. Pourquoi pas encore ici ?
SG : Parce que nous n’avons pas encore lancé la démarche officielle. Il reste quelques réticences parmi les producteurs, certains doutent encore de l’intérêt d’une telle appellation. Le syndicat souhaite d’abord fédérer, expliquer et construire un consensus.
G : Une fois l’appellation obtenue, l’Union des Grands Crus acceptera peut-être la présentation des blancs secs dans ses événements ?
SG : Oui, exactement. C’est un vrai sujet.
G : Le blanc sec représente quelle part de votre production ?
SG : Ils représentent deux tiers de nos volumes. Sur les 90 hectares du vignoble, 40 sont dédiés aux blancs secs et 50 aux liquoreux.
G : En quoi vos vins se distinguent-ils ?
SG : À Guiraud, l’encépagement fait partie de notre ADN : 65 % de sémillon et 35 % de sauvignon, ce qui est assez rare à Sauternes. C’est historique, et cela contribue à l’identité du domaine. Pour les blancs secs, l’atout principal est notre terroir de graves argileuses et sableuses, idéal pour des sémillons délicats, souples, avec du charme et de la densité, sans la rusticité qu’on retrouve parfois sur les sols très argileux de Sauternes. C’est ce qui donne au G de Guiraud son style unique : un assemblage moitié sémillon, moitié sauvignon, rond, enveloppant, facile, avec une belle fraîcheur mais sans tension marquée. J’y tiens beaucoup: c’est sa signature.
G : Tu m’as dit vouloir plus de fraîcheur et de tension dans Château Guiraud. Peux-tu préciser ?
SG : Oui. Guiraud revendique depuis longtemps un équilibre maîtrisé en sucre. Grâce au sauvignon, on peut ajuster la sucrosité et préserver la fraîcheur. Je tiens à éviter les excès de concentration, que le réchauffement climatique favorise. En 2022, certains lots atteignaient 450 g de sucre résiduel au moût, soit environ 30 % d’alcool potentiel. Nous avons choisi de ne pas les intégrer à l’assemblage, car ils alourdissaient le vin. Je revendique une douceur maîtrisée et la pureté aromatique. C’est ce que nos clients apprécient. À chaque dégustation, le « Petit Guiraud », élaboré à partir des plus beaux terroirs mais vendangé plus tôt, séduit par sa fraîcheur et sa légèreté, avec environ 90 g de sucre résiduel. Il exprime pleinement la noblesse du botrytis sans excès. Beaucoup de gens me disent, même après avoir goûté Château Guiraud : « Mais qu’est-ce qu’il est agréable, ce Petit Guiraud ». Cela montre clairement que finesse et équilibre priment aujourd’hui sur la sur-concentration.
G : Tu abordes un sujet clé : comment attirer le consommateur, et surtout la génération Z, vers le Sauternes ?
SG : Certains châteaux ont tenté l’approche des cocktails, et c’est une piste, notamment pour séduire les plus jeunes. Mais il faut mobiliser plusieurs leviers. Les blancs secs sont une autre porte d’entrée, plus accessible : on peut espérer que des consommateurs curieux aient ensuite envie de découvrir les liquoreux. Le dernier outil, c’est la table. Il faut montrer que nos liquoreux peuvent accompagner des mets variés, au-delà des accords classiques.
Toutes les propriétés de Sauternes travaillent dans ce sens, mais il faut reconnaître qu’on peine encore à convaincre, même les sommeliers. Beaucoup disent que leurs clients sont réticents. Pourtant, dans notre restaurant à Guiraud, comme au Cercle de Guiraud, notre chef propose systématiquement des accords avec les vins de Sauternes. Et cela fonctionne : nous servons un nombre incroyable de verres et de bouteilles. Évidemment, les visiteurs sont déjà dans l’univers Sauternes, mais ils se régalent vraiment avec ces associations, souvent salées. Il suffit parfois d’ouvrir une bouteille ou de la mettre sur la table, pour déclencher ce geste et changer les perceptions.
G : Et sur les cartes des vins, les Sauternes sont trop souvent cantonnés aux desserts…
SG : Oui, c’est un vrai problème. Il faut absolument sortir de cette vision réductrice. Le changement doit venir des sommeliers, et dans la manière dont les cartes sont conçues.
Le Commerce
G: Quels sont vos principaux marchés ?
SG : Nos ventes sont assez équilibrées : 30 % aux États-Unis, 40 % en Europe, et 30 % en Asie. Guiraud a très tôt investi le marché asiatique, notamment grâce à notre brand ambassadrice, Anne Xavière Vernay, basée en Australie, qui couvre l’Asie et l’Océanie. Elle a beaucoup travaillé en Chine depuis 2017, mais ce marché s’est presque arrêté avec la pandémie. Nous espérons une reprise rapide. Nous développons aujourd’hui l’Asie du Sud-Est, notamment les Philippines et l’Australie. Mais notre priorité pour les deux à trois ans à venir, c’est de recentrer nos efforts sur l’Europe, et particulièrement la France, avec un retour sur des marchés de proximité parfois délaissés. L’Espagne, le Royaume-Uni et l’Allemagne sont au cœur de notre stratégie, car nous y avons un peu de retard. En France, un commercial dédié, Etienne d’Hendecourt, travaille à renforcer notre présence dans la restauration et chez les cavistes pour les quatre propriétés viticoles du groupe. Nous aimerions beaucoup nous développer à Paris, un marché à part entière où nous avons été trop absents. À Bordeaux, nous sommes bien représentés, avec le G de Guiraud, le Grand Vin, et une belle vitrine à la brasserie de la Cité du Vin, reprise par notre propriétaire en 2024 à travers Latitude Vin.
G : Vous travaillez avec combien de négociants de la Place de Bordeaux ?
SG : La Place reste très importante pour nous. Nous vendons environ 90 % par la Place et travaillons en moyenne avec 50 négociants, mais jusqu’à 70 pour le G de Guiraud. Nous vendons 10 % de la production par nous-même et recevrons entre entre 5 000 et 6 000 visiteurs par an à la propriété où nous sommes ouverts 7 jours sur 7 à partir du mois d’avril.
G : On sent une volonté de Matthieu Gufflet de reprendre une part de la distribution en direct.
SG : Oui, c’est un axe important, pour notre image et pour soutenir la commercialisation. Les liquoreux sont distribués par la Place de Bordeaux, mais nous voulons en vendre davantage, or ce n’est pas leur priorité. Nous restons partenaires du négoce et prêts à les accompagner, mais nous devons aussi développer des ventes en direct, en parallèle.
G : Il faut le dire, et je dis même bravo à Matthieu Gufflet, ce grand entrepreneur français qui investit dans notre région.
SG : Oui, et notre enjeu aujourd’hui, c’est de faire un vrai travail de fond pour faire connaître nos vins et les distribuer plus largement. On ne peut pas faire autrement. Nous avons une équipe de quatre commerciaux pour les quatre propriétés du groupe. Trois commerciaux sont déployés à l’international : un en Europe, un aux US (partagé avec le Domaine de Chevalier et Château Canon La Gaffeliere) et une en Asie-Océanie. Ainsi que Coralie Bernard qui travaille étroitement avec le négoce bordelais : elle les accompagne sur nos liquoreux, un travail qu’ils ne peuvent pas toujours faire eux-mêmes. Avec l’aide d’Anne Xaviere, elle prospecte de nouveaux partenaires pour ensuite les orienter vers le négoce. Elle ne vend rien en direct. Elle prospecte de nouveaux partenaires pour ensuite les orienter vers le négoce. Elle ne vend rien en direct. C’est un mode de travail vertueux : chacun y trouve son compte. Le négoce bordelais a une force incroyable, un réseau immense, et une logistique impressionnante. C’est à nous de les accompagner dans la commercialisation. Guiraud fait ce travail depuis longtemps, mais depuis trois ans, nous avons accentué nos efforts. On espère maintenant que Bordeaux, dans son ensemble, prenne aussi ce virage.
G : Tu es en contact direct avec les clients, les sommeliers, les consommateurs… Est-ce que les notes comptent encore vraiment pour eux ?
SG : Pour les liquoreux, c’est plus nuancé et ça dépend du marché. Aux États-Unis, certains amateurs y restent attachés, mais ce n’est pas systématique. En janvier, j’ai tourné avec l’un de nos distributeurs historiques là-bas : lui ne se base pas du tout sur les notes, il préfère faire goûter les vins et laisser parler leur qualité. Cela dit, certains importateurs en ont encore besoin pour appuyer leurs ventes, surtout dans la relation importateur-distributeur. Mais au niveau des cavistes, restaurants ou clients finaux, les notes pèsent beaucoup moins. Les réseaux sociaux ont changé la donne : l’impact des grands critiques s’est dilué. Il y a aujourd’hui une multitude d’avis, et l’autorité d’une note Parker, par exemple, ne pèse plus autant. Les notes restent un indicateur, bien sûr, mais elles ne sont plus déterminantes. C’est encore plus vrai pour les blancs secs de Bordeaux. Ils n’ont pas toujours des notes spectaculaires, et pourtant, ils se vendent très bien. Je pense d’ailleurs à notre liquoreux 2022 : il n’a pas obtenu de notes extraordinaires lors de sa sortie en primeurs. Peut-être parce que je n’ai pas assez expliqué ma démarche, qui était de préserver la fraîcheur plutôt que de chercher la concentration. Face à des vins plus riches, Guiraud est passé plus discrètement. Il faut donc que nous soyons plus actifs dans notre communication et là, les réseaux sociaux me semblent aujourd’hui plus puissants que les notes.
La Distribution Aujourd’hui & Demain
G : Comment évalues-tu la situation actuelle du marché ?
SG : 2024 a été difficile pour tout le monde, mais Sauternes a mieux résisté que d’autres appellations de Bordeaux. Grâce à un dynamisme de l’appellation, nous nous faisons connaître et nous recevons beaucoup de visiteurs.
G : Vous avez vraiment fait un travail formidable dans l’appellation. Les portes des châteaux sont ouvertes, il y a une belle offre gastronomique, et la région est magnifique.
SG : Oui, effectivement. Tout cela nous a permis d’atténuer l’impact de l’année 2024, durant laquelle de nombreuses ventes de vin ont brusquement cessé. Nous restons très connectés à nos clients finaux, aux amateurs de vins qui viennent nous voir. Cela nous a aidé à mieux traverser cette année difficile. Je constate que notre appellation souffre moins que d’autres à Bordeaux. Nous avons réussi à atténuer un peu l’effet de la mutation du marché. À Sauternes, cette mutation a commencé il y a quelques années. Lorsque nous avons fait face à la difficulté de vendre nos vins liquoreux, nous n’avons pas eu d’autre choix que de nous réinventer, de trouver d’autres façons d’attirer le public, notamment par l’œnotourisme, l’accueil à la propriété, et les restaurants de l’appellation. Tous ces éléments sont devenus des vitrines pour recruter de nouveaux ambassadeurs et promouvoir nos vins. Tous ceux qui viennent vivre l’expérience Sauternes, que ce soit à Lafaurie-Peyraguey, à Yquem, ou à la Maison de Sauternes, seront conquis par nos vins. Il faut continuer dans cette direction.
G : Ces difficultés sont-elles conjoncturelles ou structurelles ?
SG : Les difficultés sont à la fois conjoncturelles et structurelles. Conjoncturelles, car le marché est en attente de l’évolution de la situation aux États-Unis, notamment avec la possibilité de nouvelles taxes, ce qui pèse sur le marché. La situation est également difficile en Asie et particulièrement en Chine. Sur le plan structurel, il est nécessaire de repenser notre distribution. Le modèle des Primeurs est-il toujours pertinent ? En 2023, nous avons vendu 25% de Guiraud en Primeurs On pourrait déplacer ce « momentum » à une autre période. Olivier Poussier a suggéré dans la Revue des Vins de France de transformer la semaine des Primeurs en une semaine de dégustation de vins livrables. Pourquoi pas ? Cela permettrait de faire découvrir le millésime mis en bouteille, à la place de la campagne Primeurs. Mais, si le modèle doit changer, cela doit être fait à une échelle globale, avec l’accord des institutions comme l’Union des Grands Crus ou le CIVB. C’est essentiel pour notre équilibre économique. Toutefois, comme l’a dit Jean-Guillaume Prats, le marché est en mutation et nous devons nous adapter. La mondialisation et la demande croissante pour des vins diversifiés créent un environnement où il est difficile de maintenir un seul modèle. Les consommateurs sont désormais plus versatiles, et cela nous pousse à repenser notre place sur le marché. Sauternes a toujours eu un positionnement de prix raisonnable et constant, sans variation excessive selon les millésimes. Cela mériterait d’être davantage valorisé. Nous sommes restés très connectés à notre marché, sans jamais dérouter le consommateur. Et pourtant, nos coûts de production sont élevés, avec de faibles rendements et des vendanges exigeantes. Aujourd’hui, les Crus Classés de Sauternes offrent le meilleur rapport qualité-prix de Bordeaux. Nos liquoreux ne sont pas chers, en réalité. Mais, comme l’a dit Bernard Arnault, il faut créer la désirabilité. Nous devons trouver les clés pour rendre nos produits attractifs et désirables pour le consommateur.
Vendanges 2024
G: Peux-tu nous dire quelques mots sur les vendanges et tes impressions de la qualité du millésime ?
SG : 2024 a été une année pleine de défis. Nous avons eu énormément de pluie, ce qui a mis une pression considérable sur la vigne, notamment avec des risques de maladies. Les températures étaient relativement chaudes, et avec la pluie, la végétation a poussé de manière abondante, ce qui a entraîné une forte pression du mildiou. C’était un véritable enjeu viticole, et nos équipes ont travaillé d’arrache-pied pour préserver un bon état sanitaire dans les vignes tout en accompagnant les vignes vers une belle maturité des raisins.
G : Tu as peut-être passé quelques nuits blanches ?
SG : Oui, effectivement…Nous avons eu très peur lorsque les premières attaques de mildiou sont apparues tôt dans la saison, dès le mois de mai. On se disait, « Ça ne tiendra jamais ». Dès que le mildiou est installé, il est trop tard pour agir, mais grâce à plusieurs passages de cuivre, nous avons réussi à le maîtriser. Finalement, nous avons récolté une belle quantité de raisins de qualité. L’arrière-saison a permis de maintenir l’acidité dans les raisins. Je l’ai déjà dit pour 2023, et je le répète pour 2024 : nous avons deux millésimes de blancs assez incroyables. Certes, 2023 est un peu au-dessus, aussi bien pour le sec que pour le liquoreux, mais je suis vraiment satisfaite du millésime 2024. Ce qui m’étonne encore, c’est la façon dont la pourriture noble a pu se développer, en dépit de la météo humide. Nous avons eu des périodes de pluie et de beau temps qui ont permis de sécher les raisins et de les récolter dans de bonnes conditions. Tout s’est très bien passé grâce à nos équipes. Nous avons travaillé avec 100 vendangeurs, dont 80 venus de l’extérieur et 20 membres de notre équipe permanente.
G : Combien de tris avez-vous effectués ?
SG : Nous avons fait quatre tris complets, et au final, la récolte s’est révélée vraiment qualitative. Même si elle n’atteint pas la richesse des millésimes 2022 ou 2023, il y a un bel équilibre entre l’acidité et la sucrosité, avec l’ADN de la pourriture noble et des arômes de confit. Nous sommes très heureux du résultat.
G : Et pour le Blanc sec ?
SG : Cette année, la pourriture noble s’est installée très tôt, ce qui a rendu la récolte un peu plus précipitée. C’était une vraie course contre la montre pour récolter les raisins sains avant l’attaque de la pourriture. Notre G de Guiraud 2024, issu d’une sélection parcellaire, est donc un peu atypique cette année, car il est composé à 70 % de sauvignon et 30 % de sémillon, alors que l’assemblage habituel est de 50 % sauvignon et 50 % sémillon. Malheureusement, nous n’avons pas pu récolter les sémillons à temps, ils ont pourri assez tôt. Les sauvignons ont été généreux en quantité, ce qui a un peu modifié l’équilibre habituel. Mais c’est aussi intéressant d’avoir un millésime un peu différent.
G : Tu travailles pour et avec un grand entrepreneur français, Matthieu Gufflet. Peux-tu me dire quelques mots sur votre collaboration ?
SG : Je suis en contact direct avec lui et il est vraiment passionné par le vin. C’est fascinant de travailler avec quelqu’un d’aussi entreprenant.Il cherche à faire une intégration verticale, en intégrant tous les maillons de la chaîne susceptibles de soutenir la commercialisation de nos vins. Sa vision à long terme m’impressionne énormément. Il sait se projeter, c’est un véritable visionnaire. Pour ma part, je suis davantage tournée vers la production, avec une vision à court ou moyen terme. Nous nous complétons bien, car il faut les deux perspectives pour bien gérer un vignoble. J’apprends énormément à ses côtés.
Gerda BEZIADE a une incroyable passion pour le vin, et possède une parfaite connaissance de Bordeaux acquise au sein de prestigieux négoces depuis 25 ans. Gerda rejoint Roland Coiffe & Associés afin de vous apporter avec « Inside La PLACE » davantage d’informations sur les propriétés que nous commercialisons.